C'était l'époque où je cherchais du neuf. Fatigué d'entendre Fifty, fatigué des mêmes hits sur les mêmes radios, fatigué de chercher ce que je ne trouvais pas.
C'était pendant l'été 2004 et je zonais a la fnac pendant un week end comme les autres, un billet de 20e en poche. Les jaquettes défilaient sous mon regard, mes doigts prenaient puis reposaient, déçus avant même d'avoir entendu la moindre note de musique.
Tiens.. Kool G Rap & DJ Polo. Deux albums pour le prix d'un. "Road to the riches" & " Wantead Dead or Alive". Je m'empare du double disque, fouillant ma mémoire. Sur l'une de mes nombreuses expéditions sur OHHLA.com, j'avais fait un arrêt sur ces deux mecs. Old School.
J'avais entendu dire du bien de ces deux comparses, alors pourquoi pas.. Mon choix est arrêté, je vais en caisse et paie. Comme bien souvent, je déballe le disque sur le quai du RER, ignorant les cris et rires hystériques de la bande de jeunes à quelques mètres et slalomant entre les canettes vides et les gens bizarres..
J'enfourne le disque dans mon discman, le visse dans la poche intérieure de ma veste et appuie sur play (sans oublier de le verrouiller pour ne pas zapper de chanson au moindre choc). Le train arrive, j'ai le temps de m'installer. Et tant mieux, a vrai dire.
Le démarrage du train accompagne la première piste "Road To The Riches". La boucle de piano sera d'ailleurs samplée par Nas sur son "Street's Disciple". G Rap & Polo introduisent le disque et les couplets de du MC viennent se déverser dans mes oreilles. Il a un cheveu sur la langue, mais franchement, ça fait sa différence. Sa diction est claire et précise et ses rimes, riches et recherchées. Un bon flow solide posé sur une mélodie agréable et qui annonce du très très bon. Un premier titre vraiment puissant, qui rentre dans la tête. D'ailleurs, je pianote des doigts sur mon genou les notes envoutantes de piano.
"It's a Demo". 2e piste. Beat original et simple à la fois, des scratchs, du genre qui va accompagner une bonne perf du MC. Et c'est le cas. Débutant par de petits couplets, G monte en puissance tout au long de la chanson. Son phrasé est remarquable, l'écriture travaillée, et ça fait du bien. C'est old school et puissant.
"Men at work". Rien qu'au tout début du titre, au beat, je sens que ça va être lourd de chez lourd. Et c'est le moins que l'on puisse dire. Avec une pêche d'enfer, G Rap lâche un couplet de deux minute trente bourré de punchlines et phases de folie:
I'm alone but my tone is a sharp tune Developing pictures in your brain like a darkroom Rappers are captured and tortured with rapture In 3-D is a G coming at you All types of words I write, put in flight Rappers evaporate to vapor, I drop science on paper And then build a skyscraper When I die, scientists will preserve my brain Donate it to science to answer the unexplained But as long as I inhale and exhale I challenge the next female or the next male
Et il enchaine dans un déferlement d'une rare puissance. Tellement que je ré écoute la chanson sur le champ pour être sûr de ne pas avoir rêvé. Mais non. Une des plus grosses claque rap que je me suis pris avec ce titre.
Plus apaisant, mais tout aussi puissant, " Truly Yours" au rythme posé et tranquille, est tout aussi bien écrit et de nombreuses phases prêtes à sourire. G Rap joue avec les mots, les marie entre eux avec une facilité incroyable
. "Cars", la 5e piste, proposera le texte le moins long du MC, une bouffé d'air frais reposante, ou l'on navigue au volant d'une caisse puissante, draguant les filles et narguant les flics, le tout sur un beat vraiment original, mi électronique mi planant...
"Trilogy of terror " au beat évoquant les plaines de l'ouest et les cow boys (pour peu, on imaginerait G Rap rappant installé sur un cheval, revolvers au ceinturon et chapeau sur le crâne) et aux rhymes toujours efficaces: Listen I'm like a seed from a demon, a blessing from an angel Way more mysterious than Bermuda's Triangle
"She loves Me, She Loves me not" repose, on en a besoin après les six gifles qu'on vient d'encaisser. Pour le peu, j'en rate presque ma station.Je descend et chope un bus presque vide, les écouteurs vissés sur les oreilles, toujours pendu aux lèvres du MC. Il nous parle d'amour, et le fait avec classe et toujours une plume alerte et affutée.
La 8e piste mettra en avant les talents de DJ POLO. Bien, mais pas ma tasse de thé. J'écoute poliment et me régale de savourer le 9e missile de l'opus.
"Rhymes I Express" sur un beat plus synthétique valorise les rhymes d'un G Rap toujours aussi affamé, aussi talentueux. J'aime. J'ai envie de balancer ma tête de droite à gauche mais je me retiens. On est dans le bus, quand même!
"Poison" la 1Oe et avant dernière track est une nouvelle cartouche dans le barillet du rappeur. Un beat puissant et saccadé accompagné d'une sirène stridente par moment, martelé par la verve et la dalle du rappeur. Hélas, toute bonne chose à une fin.
"Butcher Stop" sera l'élément final de l'album. L'occasion de savourer une nouvelle fois l'imagination, la technique et le talent de ce que je considère être comme l'un des deux plus grand rappeur de l'histoire de la musique (le second étant Nas). Un premier classique. La touche "replay" pressée un nombre incalculable de fois. Une bonne grosse baffe dans la tronche.
10/10
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